Contribution de la FAFCE au 4e Sommet du Conseil de l’Europe (Reykjavik 16-17 mai 2023)
22 février 2023,
Le Conseil de l’Europe organise le 16 et 17 mai prochain un 4e Sommet des chefs d’État et de gouvernement à Reykjavik, en Islande. C’est un événement d’importance : le dernier sommet de ce type s’est tenu en 2005 à Varsovie, tandis que les deux précédents avaient eu lieu à Strasbourg en 1997 et à Vienne en 1993 (plus d’informations ici). Lors du Sommet de Varsovie, le Conseil de l’Europe avait adopté un plan d’action dont un chapitre consacré à la « construction d’une Europe plus humaine et plus inclusive » : « Nous sommes convaincus – on peut le lire dans le plan d’action – que la cohésion sociale, ainsi que l’éducation et la culture, sont des facteurs habilitants essentiels pour la mise en œuvre effective des valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe dans nos sociétés et pour la sécurité à long terme des Européens. » Le chapitre mettait l’accent sur la nécessité de construire une Europe pour les enfants… Mais sans jamais faire référence à la famille, moteur pourtant fondamental de la cohésion sociale et premier cadre naturel pour le développement des enfants.
Ignorer la famille n’a pas donné de bons résultats : « Comme l’a noté la Secrétaire générale dans son rapport de 2021 « Situation des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit – Un renouveau démocratique pour l’Europe », nous assistons à un « degré manifeste et préoccupant de recul démocratique ». « L’environnement démocratique et les institutions démocratiques de l’Europe connaissent un déclin qui se renforce mutuellement » (cité dans le rapport du Groupe de réflexion à haut niveau du Conseil de l’Europe en octobre 2022, p. 13). De plus, « l‘année 2022 restera dans les mémoires comme celle d’une terrible violence et d’un changement sismique en Europe » (ibidem, p. 9), avec une terrible guerre en Ukraine dont la fin semble encore lointaine.
Dans ce contexte, le Sommet de cette année « s’efforce de faire en sorte que le Conseil de l’Europe soit en mesure de relever les défis actuels et futurs, ainsi que les attentes des générations futures « . Pour cette raison, le Conseil de l’Europe sollicite les contributions à un questionnaire de la part de toutes les parties prenantes du Conseil de l’Europe, y compris les ONG dotées du statut participatif, comme la FAFCE.
La Fédération encourage le Conseil de l’Europe à investir dans le futur démographique de l’Europe: « On ne peut penser les transitions digitales, écologiques, ou même la promotion des droits de l’homme en Europe en l’absence d’une génération suivante pour relever ces défis. Il s’agit tout simplement du futur humain de l’Europe ». Elle porte en ce sens le rôle clé des associations familiales comme des partenaires d’élaboration de politiques publiques familiales ambitieuses.
Comment le Conseil de l’Europe peut-il créer un cadre pour une action efficace sur les défis actuels et futurs (par exemple sur des questions telles que l’environnement et les droits de l’homme, les inégalités et le numérique) ?
La Fédération des associations familiales catholiques en Europe (FAFCE) est une organisation représentants 32 associations familiales de 19 pays européen, avec un statut participatif auprès du Conseil de l’Europe depuis 2001.
Notre Fédération souhaite porter à l’attention du Conseil de l’Europe le défi démographique européen.
L’Europe est confrontée à un schéma clair de baisse des taux de natalité : en 2018, le nombre moyen d’accouchements dans l’UE était de 1,55 par femme. C’est inférieur à la valeur de 2,1 considérée comme le niveau requis pour maintenir la taille de la population constante. D’ici 2070, 30,3 % de la population européenne sera âgée de 65 ans ou plus (contre 20,3% en 2019). Le déséquilibre démographique va de pair avec la diminution de la main-d’œuvre disponible et l’augmentation du taux de dépendance des personnes âgées, notamment en ce qui concerne l’arrivée à la retraite de la génération des baby-boomers, avec un pic prévu en 2050.
Aucun pays européen n’atteint 2,1 enfants par femme. Les taux de fécondité les plus bas ont été enregistrés à Malte (1,23), en Espagne (1,26) et en Italie (1,29).
Face au constat du déséquilibre démographique en Europe, la FAFCE porte une solution simple : investir dans la famille, dans les couples qui souhaitent avoir des enfants mais font face à des obstacles économiques, professionnels et culturels. Au lieu de s’adapter au changement démographique, il nous est encore possible de l’inverser, afin d’avoir une société durable et prospère.
La FAFCE souhaite convaincre les décideurs européens d’établir un Pacte européen de la natalité. Il s’agit de veiller à ce qu’il n’y ait pas d’obstacles dans les politiques publiques interférant avec l’engagement personnel des parents et leur souhait de développer leur famille. Nous portons cette solution auprès de ministres nationaux compétents sur ces questions, ainsi qu’auprès des institutions du Conseil de l’Europe et de l’opinion publique.
Nous encourageons le Conseil de l’Europe à être un lieu d’échange sur les questions démographiques. On ne peut penser les transitions digitales, écologiques, ou même la promotion des droits de l’homme en Europe en l’absence d’une génération suivante pour relever ces défis. Il s’agit tout simplement du futur humain de l’Europe.
Quel devrait être le rôle du Conseil de l’Europe dans l’évolution de l’architecture multilatérale européenne et la gouvernance mondiale ?
« Les familles sont le trésor de l’Europe et la pierre angulaire de son avenir« . Tel est le titre de notre déclaration faite à l’occasion du 20ème anniversaire de notre Fédération. Nous avons fait référence aux considérants 8, 16 et 27 de la Charte sociale européenne, rappelant que la famille a droit à une protection sociale, juridique et économique appropriée pour assurer son plein développement (considérant 16) ; rappelant que toutes les personnes ayant des responsabilités familiales et qui exercent ou souhaitent exercer une activité professionnelle ont le droit de le faire sans faire l’objet de discrimination (considérant 27) ; rappelant également que les femmes salariées, en cas de maternité, ont droit à une protection spéciale (considérant 8).
Mais que fait le Conseil de l’Europe pour assurer la mise en œuvre de ces principes dans les États membres ? Quel est le rôle du Conseil de l’Europe ? Si nous croyons réellement que « la famille est l’élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l’Etat« , comme le stipule l’article 16.3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, nous ne pouvons ne pas poser ces questions, qui sont également fondamentales pour la gouvernance mondiale.
La stratégie du Conseil de l’Europe pour les droits de l’enfant (2016-2021) a reconnu que « les enfants apprécient énormément les relations avec leurs parents et leurs frères et sœurs » et que « les familles peuvent être confrontées à de nombreux défis. […] De nombreux parents manquent de soutien pour remplir leur rôle dans l’éducation de leurs enfants et garantir leurs droits« .
Afin d’aider les États membres à reconnaître cette réalité, des données et des analyses empiriques sont essentielles. En 2009, le Comité d’experts sur la politique sociale de la famille et de l’enfance a élaboré un questionnaire complet sur les politiques familiales nationales et a compilé 40 réponses nationales, qui ont formé « une grande base de données avec des données quantitatives et qualitatives détaillées sur tous les secteurs pertinents de la politique familiale » permettant d’analyser les développements et la dynamique des politiques familiales dans un certain nombre d’États membres du Conseil de l’Europe (Family Policy in Council of Europe Member States, Introduction). Presque 25 ans plus tard, une nouvelle publication de ce type serait un bon point de départ pour une politique familiale renouvelée afin de relever les défis de l’hiver démographique et de répondre aux besoins réels de tous les Européens.
Comment le Conseil de l’Europe peut-il devenir une organisation plus moderne dotée d’un cadre adapté pour mieux soutenir les Etats membres et mieux répondre aux défis actuels et futurs ?
La Fédération des associations familiales catholiques en Europe souhaite porter à l’attention du Conseil de l’Europe le rôle des acteurs de la société civile comme experts des besoins réels des européens, au plus près du terrain.
Nous souhaitons tout particulièrement insister sur le rôle et l’importance des associations familiales.
Les associations familiales ont une double mission : elles agissent tout d’abord comme des « villages de solidarité » pour les familles, qui ont souvent l’impression d’être seules face à certains défis : environnement, digitalisation et éducation de leurs enfants. Elles interprètent localement les besoins des familles et prennent des initiatives pour y répondre : services, rencontres, formation, aide éducative, etc. Mises en réseaux, les familles sont informées et soutenues, et peuvent entrer en relation avec d’autres familles vivant les mêmes situations.
Les associations familiales ont ensuite pour fonction de représenter les familles au sein de la sphère publique et politique, en formulant leurs besoins, leurs demandes, et en promouvant la contribution que celles-ci offrent gratuitement à la société. Elles sont une force de proposition permanente auprès des acteurs économiques, sociaux et politiques : ce faisant, les familles deviennent protagonistes des politiques familiales, et non de simples récepteurs passifs.
Les associations familiales peuvent être locales, régionales ou nationales. Leurs missions sont plurielles : soutien au logement, aide à l’éducation des enfants, accueil des familles de migrants, aide aux jeunes mères en détresse et aux parents d’enfants handicapés, etc.
Les associations familiales constituent un acteur clef de démocratie et de participation de la société civile organisée au respect des droits de l’homme en Europe. Celles-ci sont directement représentées au sein du Conseil de l’Europe par leur Fédération européenne, la FAFCE, dans le cadre de la Conférence des ONG internationales.
Pour plus d’information sur le rôle des familles pour la démocratie en Europe: Résolution du Conseil de présidence FAFCE – printemps 2021 : La famille est l’avenir démocratique et démographique de l’Europe